La réticence de la communauté internationale à intervenir en Haïti

Malgré les appels de l’ONU, la communauté internationale hésite à envoyer une force pour lutter contre les gangs qui terrorisent Haïti. Les expériences passées et les risques d’enlisement dans un conflit meurtrier dissuadent de nombreux pays de contribuer à une telle force. Richard Gowan, analyste à l’International Crisis Group, souligne que le déploiement d’une force internationale serait risqué et que de nombreux États membres de l’ONU craignent d’être entraînés dans un bourbier. Malgré l’appel à l’aide du Premier ministre haïtien et du secrétaire général de l’ONU, aucune initiative concrète n’a été prise.

Les violences des gangs et l’absence de soutien international

Les gangs qui contrôlent environ 80% de la capitale haïtienne continuent de semer la terreur avec des tireurs embusqués, des viols, des enlèvements et des meurtres. Malgré cette situation alarmante, aucun pays ne s’est porté volontaire pour prendre la tête d’une force internationale. Les États-Unis, le Canada et le Brésil, entre autres, ont tous exprimé leurs réticences à s’engager dans une telle mission. Les diplomates reconnaissent une certaine frustration et continuent de chercher une nation chef de file pour une force multinationale. Toutefois, la peur des gangs et des conséquences humanitaires empêche de nombreux pays de s’engager.

Les difficultés d’une intervention en Haïti

Walter Dorn, professeur au Collège militaire royal du Canada, souligne que la guerre en zone urbaine est extrêmement difficile. Le risque de tuer des civils innocents est élevé et les gangs pourraient utiliser des boucliers humains. Cependant, certains experts estiment que malgré ces défis, une force d’intervention internationale est possible. Certains suggèrent qu’il faudrait au moins 7 000 soldats et autant de policiers, des chiffres similaires à ceux de la Minustah, la force de maintien de la paix de l’ONU présente en Haïti de 2004 à 2017. Les discussions se dirigent désormais vers une force de police armée plutôt qu’une intervention militaire.

Les enjeux politiques et économiques en Haïti

Outre les défis opérationnels, il y a aussi des enjeux politiques et économiques à prendre en compte. Le pays n’a pas organisé d’élections depuis 2016 et la légitimité du Premier ministre est remise en question. La transition politique et la relance de l’économie sont des éléments clés pour éviter un enlisement de la situation en Haïti. L’opposition haïtienne souligne que le soutien de la communauté internationale à un gouvernement illégitime pose problème. Les expériences passées, comme l’épidémie de choléra causée par les Casques bleus de la Minustah, ont laissé un goût amer à la population haïtienne. Face à l’impasse, le Conseil de sécurité de l’ONU a demandé à Antonio Guterres de présenter des options possibles, y compris une mission de l’ONU. Cependant, une source onusienne indique qu’un retour à une forme traditionnelle de maintien de la paix est improbable.

Les réticences de la Chine et les perspectives d’action

La Chine se montre sceptique quant à une intervention internationale en Haïti. Elle insiste plutôt sur la nécessité de lutter contre le trafic d’armes en provenance de Floride vers Haïti. Cependant, Richard Gowan estime que la Chine n’utilisera pas son veto pour empêcher la création d’une mission de l’ONU. La question du mandat précis et des risques potentiels d’échec et d’enlisement reste en suspens. Une décision finale devra être prise par le Conseil de sécurité de l’ONU.

Source : RCI